L'orignal, la reinette et le capybara
Messieurs dames, ça y est, c’est officiel: j’ai 22 ans et je suis nostalgique.
A bien y réfléchir, un blog c’est une sorte de journal intime ouvert au monde (merci la réflexion digne de Direct 8) : il permet, plusieurs années plus tard, de se relire et de se souvenir de certains moment insignifiants qu’on a vécu et qu’on a oublié.
Après relecture de certains vieux articles à la recherche d’une inspiration pour nouveau, je me suis rendu compte que la grande majorité des anciens articles ne parlaient de rien. Mais alors rien. Pas un film, pas un livre, même pas forcément une aventure rigolote. Mais le miracle de tout ça, c’était que je m’en sortait bien pour raconter rien, tout en plaçant des blagounettes et des tournures de phrases rigolotes. Pleine d’innocence et de gaîté, je m’élançais tel un orignal fou sur les landes mornes du néant rédactionnel.
Mais j’y étais tellement bien ! Je remplissais la taïga froide et vide par ma fougue et mon rire, je dansais dans le vent de ma propre platitude !
Malheureusement, la jeunesse se passe et la fougue de la blogeuse folle de 18 ans s’est répandue à terre tel un vieux phallus octogénaire. J’ai maintenant besoin de choses aussi bassement matérialistes qu’un sujet pour pouvoir poster à nouveau. La source de ma création narrative s’est tarie, vidée par les pompes grondantes de l’usine de produits chimiques de la vie active, laissant dépérir les poissons de l’inspiration, le phasme de l’imagination et la reinette de l’aisance littéraire. Ainsi agonise peut à peut la petite libellule de l’espoir de lecteur, sans parler de la fragile coccinelle des commentaires. Comment un écosystème aussi délicat pourrait-il survivre à la frénésie de la vie sociale, détruisant tout sur son passage, entraînant avec elle les bulldozers de la vie amoureuse, les marteaux piqueurs du plan de carrière et les bétonneuses de la recherche de logement ? Tous ces changements entraînent la mort de la faune littéraire et de la flore créatrice mais malgré tout dans un but noble : celui de construire le futur quartier de ma vie.
J’essayerai pourtant, envers et contre tout, de maintenir un espace de verdure dans mon nouveau quartier : je laisserai couler le long des rues des relations familiales le petit canal de l’inventivité, vestige de ma source de création originelle. Entre deux immeubles du travail sur mon mémoire, je maintiendrai en vie des petites forêts de saules de l’innovation, de bouleau des belles-lettres, de cyprès de la fantaisie et de chênes lièges parce que c’est joli.
Ma ville quotidienne sera une ville dynamique, aux larges carrefours et toujours prête à accueillir une nouvelle Place des Fêtes, mais aussi une ville verte, dotée de nombreux bancs de l’imaginaire pour se reposer et regarder s’ébattrent les doux capybara de la joie d’écrire.
Je vous préviens, je ferais pas ça tous les jours.